samedi, 29 décembre 1917

Tout va très bien Madame la…

Au ministre de l’Intérieur qui s’inquiète de l’état d’esprit de la population, le préfet de la Loire-inférieure répond aujourd’hui, dressant un étonnant tableau de son département :

 

« Depuis le mois de mai dernier, le moral des populations de la Loire-Inférieure ne semble avoir subi aucun fléchissement malgré les événements russes et italiens. Je dois à la vérité de dire que l’attention des habitants de cette région est en grande partie détournée des préoccupations que peut créer l’état de guerre par l’intérêt que présente actuellement le développement industriel, commercial et agricole. La prospérité économique de la Loire-Inférieure prend, en effet, chaque jour une extension plus grande et chacun a surtout le souci de bénéficier d’un état de choses qui, à cet égard, le favorise particulièrement.

 

Il est difficile d’apprécier à l’heure actuelle la répercussion sur l’état d’esprit du public des restrictions apportées… Depuis plusieurs mois, en effet, ces restrictions menacent et pour des raisons diverses se sont trouvées retardées dans leur application [la municipalité Bellamy n’a pas encore appliqué la carte de pain – voir notre chronique du 22 décembre; ce sera fait le 1er mai 1918]

 

Ce n’est donc qu’après la mise en vigueur de la carte de pain – si son établissement apparaît nécessaire – qu’il sera possible d’émettre à cet égard un avis autorisé. Les autres restrictions ont assurément créé dans le public une certaine gêne et partant ont provoqué quelques récriminations, trop isolées pour être assimilées à une protestation générale.

 

La population de la Loire-Inférieure… se désintéresse à l’heure actuelle de toute question politique ».

 

La pénurie généralisée s’arrête aux grilles de la préfecture.