lundi, 8 mai 1916

Revenons à nos moutons

Depuis le 3 mai, l’offensive allemande autour de Verdun redouble d’intensité. Sur la rive gauche de la Meuse, elle se concentre autour de la cote 304 et du Mort-Homme, où les Français résistent difficilement.

 

Le général Buat note dans son Journal :

 

« La bataille de Verdun a continué par spasmes qui ont été particulièrement violents du 4 au 8 mai. Les boches ont procédé, sur la rive gauche de la Meuse et sur un front relativement étroit, à un bombardement d’une violence sans précédent. Il est clair que, dans la formation défensive que nous avons encore, rien ne peut tenir devant une pareille avalanche de projectiles. Force nous a été de quitter les lignes qui se présentaient en espaliers sur les pentes faisant face à l’ennemi et de nous retirer en arrière des crêtes. C’est ce qui est advenu sur le plateau de la cote 304 ».

 

Sur la rive droite, l’ennemi reprendra, le 24 mai, le fort de Douaumont, en partie réoccupé par les Français le 22, puis progressera vers le fort de Vaux.

 

Du 3 au 25 mai, les journaux nantais se contentent de publier les communiqués officiels (souvent incomplets) et des articles rédigés par les services de l’armée ; mais aucun éditorial ne vient donner un peu de solennité à la bataille. On feint même de l’ignorer. Gaston Veil, dans Le Populaire, commence ainsi son éditorial du 14 mai:

« Puisqu’en ce moment ni les opérations militaires, ni les négociations politiques ne présentent un intérêt très vif, j’en profite pour revenir à mes moutons, c’est-à-dire à la question de l’enseignement classique ».

 

Que des poilus tombent par milliers, que la guerre atteigne un niveau de brutalité exceptionnel, n’est pas d’ « un intérêt très vif » ?

Les éditorialistes classiques y perdent leur latin.