samedi, 2 février 1918

Moissons d’hiver

C’est l’hiver.

Comme la nature, la guerre à son cycle végétatif.

Les grandes offensives reprendront au printemps.

Pour l’instant, la guerre se fait oublier et les journaux de l’arrière n’en parlent guère. Mais elle n’hiberne pas. Sur le front, duels d’artillerie, travaux de sape, mines, coups de main, gaz moutarde (ypérite) assurent en permanence une moisson de morts.

 

Depuis l’hôpital de campagne où il est affecté, Alphonse de Châteaubriant écrit à sa sœur :

« J’ai fait ces jours-ci, une besogne bien terrible. Je viens d’enterrer, de faire glisser dans le trou, en un peu plus de quatorze heures, quarante-huit cadavres. Attaque au gaz. Tous ces morts nous sont arrivés en pleine nuit. Nous les avons étendus dans notre grange. Le matin, au petit jour, mes hommes, qui ne savaient rien, sont venus buter dedans, en descendant prendre leurs harnais. »