vendredi, 13 juillet 1917

L’état d’esprit des permissionnaires

Aujourd’hui, dans un courrier au préfet qui s’inquiète « d’une propagande pacifiste et démoralisante qui s’exercerait aux abords de certaines gares », le commissaire spécial de police de Nantes revient sur les incidents causés au mois de juin par les trains de permissionnaires traversant la ville.

En réponse à la question du préfet il affirme, à quatre reprises, « qu’aucune propagande pacifiste n’a pu être constatée jusqu’ à ce jour aux abords de la gare ». Puis, sur les incidents passés, il fournit des explications fondées sur l’observation des soldats par ses services :

« Un certain découragement perçait dans leurs conversations, et leur moral paraissait atteint. Leurs officiers (de tout grade) faisaient l’objet de critiques violentes parfois, tant du point de vue de leur conduite au front qu’au sujet de leur attitude au feu…Un assez grand nombre d’entre eux, sous l’influence de la boisson, traduisaient leurs sentiments par les cris de « A bas la guerre ».

« La révolution des Russes et l’inaction de leurs armées qui paraissaient se retirer de la lutte, contribuèrent de leur côté à développer le malaise. De là les cris de « Vive la Révolution » qui s’ajoutaient à ceux de « A bas la guerre »… ».

« Il est certain que l’affluence des curieux, des femmes surtout, sur le passage de ces trains dans la ville n’était pas sans fournir un prétexte ou plutôt un auditoire bénévole aux manifestants… ».

« Cet état d’esprit de nos permissionnaires s’est d’ailleurs « bonifié » depuis quelques semaines. D’abord l’élément turbulent qui venait de Bretagne ne passe plus par Nantes mais par Redon ; ensuite le moral paraît s’être relevé et les critiques violentes d’il y a deux mois ont pris fin… Le départ des permissionnaires se fait actuellement sans trouble, l’affluence des curieux sur le passage des trains et à la gare a diminué… ».