lundi, 31 mars 1919

« Villain acquitté ! »

Ce titre, ponctué d’une exclamation outrée, occupait toute la une du Populaire hier.

 

La dernière audience de l’assassin de Jean Jaurès s’était terminée le 29 mars au soir par ce verdict surprenant :

« C’est l’acquittement. Le président Boucard ordonne la mise en liberté de Raoul Villain, qui sourit, et serre la main de ses avocats. La partie civile obtient 1 franc de dommages intérêts ». (Le Populaire)

 

Aujourd’hui, Gaston Veil revient sur : « Les suites d’un verdict scandaleux » ; c’est le titre de son éditorial. Il y analyse, en particulier, les réactions de la presse dont le journal, en pages intérieures, cite de larges extraits :

« Personne ne prévoyait ce verdict là. Les amis du meurtrier eux-mêmes n’osaient l’espérer. Ils sont quelque peu gênés par ce succès qui dépasse leurs vœux. Leurs journaux, tout en approuvant le jugement, sont embarrassés pour l’expliquer.

Quant aux journaux de grande information, qui ne veulent pas se compromettre et qui, par un avis bien tranché, craindraient de déplaire à une partie ou à l’autre de leur clientèle, ils s’abstiennent d’émettre une opinion. C’est plus prudent.

La presse républicaine est unanime à réprouver l’acquittement de l’assassin. Chez les uns c’est un cri de colère et d’indignation ; chez les autres, c’est le sentiment que, non seulement une injustice, mais une faute grave a été commise. Le verdict du jury de la Seine est une provocation à la classe ouvrière. Elle se souviendra ».

 

Le Phare se contente de citer le verdict sans plus de commentaire ; aucun éditorial, aucun article non plus, les jours suivants, pour signaler les manifestations qui se déroulent en France, et à Nantes, en mémoire de Jaurès.

 

 

Raoul Villain lors de son procès