dimanche, 24 mars 1918

Paris sous le feu d’un canon politique

« Paris bombardé par un canon boche » titre en une Le Phare qui explique : « L’ennemi a tiré sur Paris avec une pièce à longue portée. Depuis huit heures du matin, de quart d’heure en quart d’heure, des obus de 210 ont atteint la capitale et la banlieue. Il y a une dizaine de morts et une quinzaine de blessés… Le canon allemand exécute un tir à 120 km de distance. La population parisienne a gardé tout son sang froid et le calme le plus absolu n’a cessé de régner ».

 

Le Populaire titre pour sa part : « A 120 km de distance un canon autrichien tire sur Paris – Hypothèses et précisions » . Suivent deux colonnes d’hypothèses qui n’apportent guère de précisions sauf celle-ci : « La pièce à longue portée qui a tiré sur Paris est évidemment destinée à donner l’impression, à l’arrière, que Paris est sous le canon allemand, c’est un canon « politique ».

 

 

 

c 24 mars

 

Sur le front de Champagne, le général Buat note dans son Journal : « Stupéfiante nouvelle ! Une pièce ennemie aurait tiré sur la capitale de 120 km de Paris. Si la chose est avérée, ces gaillards-là sont tout de même de fameux lapins. Mais cela demande confirmation ».

Ce canon qui suscite autant de craintes que de questions, c’est celui que les Parisiens appelleront bientôt la « Grosse Bertha » et les Allemands « Pariser Kanonen » ou « La Parisienne ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les Bertha, du nom de Bertha Krupp, fille du célèbre métallurgiste allemand étaient des canons de gros calibres utilisés depuis le début de la guerre. Les Allemand les modifient à la fin de l’année 1917 pour en faire aussi des canons à longue portée capables d’atteindre Paris. Pesant 750 tonnes (avec la plate-forme de tir), ne pouvant être déplacés que sur une voie ferrée, ils sont localisés à 120 km de la capitale à Crépy-en-Laonnois.

La première campagne de tir débute le 23 mars 1918 et durera jusqu’au 3 mai quand l’éclatement d’un canon exigera une interruption des tirs de trois semaines. Le premier jour, les tirs se succèdent de 7 h 09 à 14 h, à une cadence d’environ un obus toutes les vingt minutes. On dénombre 15 morts et 29 blessés après cette première journée.