mardi, 1 juin 1915

« On arrive au moment de l’action »

 

Conscients que la mort les guette à chaque instant, certains soldats rédigent, dès les premiers mois de la guerre, une lettre-testament à envoyer à leur famille au cas où.

 

D’autres, avant de repartir en premières lignes pour une offensive pleine de périls, livrent le fond de leur pensée et de leur cœur dans une lettre qui, peut être, sera la dernière.

 

C’est le cas de Léon Jost dans ce courrier à son père :

« Je t’assure que je n’ai pas grand mérite à avoir les sentiments qui paraissent dans mes lettres. Cela est si simple ici. On arrive au moment même de l’action, sans presque sans douter, et on parle du départ pour l’attaque et de la possibilité d’y rester, comme si cela n’avait en fait aucune espèce d’importance. Pourtant, si chacun fait si facilement le sacrifice de sa vie, c’est que chacun se rend compte aussi de la grandeur de l’œuvre qu’il accomplit. Mais on n’en conserve pas moins l’espérance tenace de la jeunesse.

 C’est toujours plein de cette espérance que je t’envoie, mon cher Papa, et du fond de mon cœur, tous les sentiments d’amour et de reconnaissance que j’ai pour toi et je te serre dans mes bras en te criant d’espérer, comme j’espère moi-même, le jour radieux du retour.

Ton fils te remercie, en effet, d’avoir su lui inculquer les sentiments qui l’agitent maintenant et dont il a besoin dans la tâche présente, et termine en t’envoyant tous ses meilleurs et ses plus tendres baisers. »

 

Soldats du 65e RI écrivant à leur famille avant de repartir au front (Photo de Léon Jost)

Soldats du 65e RI écrivant à leur famille avant de repartir au front (Photo de Léon Jost)