mercredi, 13 juin 1917

« Le train de 20 heures 25 »

 

Les incidents répétés provoqués par les poilus permissionnaires dans les gares de Nantes amènent les autorités à utiliser la presse locale pour tenter de ramener le calme.

Le Populaire et Le Phare consacrent chacun un article aux événements. Les deux journaux évoquent d’abord les incidents tels qu’ils ont été relatés par le commissaire de police dans notre chronique du 11 juin, rappelant : « Voici huit jours peut-être que tous les soirs nous assistons au même spectacle ». Mais chacun interprète ce « spectacle » à sa façon.

 

Pour Le Populaire, sous le titre « Le train de 20 heures 25 » tout cela n’est qu’un joyeux chahut : « Les paroles proférées par les voyageurs du train sont lancées en manière de gageure et de plaisanterie. La plupart des cris s’achèvent par un éclat de rire… ». Devant le public massé sur les quais : « Ils font les braves, ils crânent un peu… ». Et le journaliste se veut rassurant : « Ceux qui crient sont sans doute des braves, qui se sont courageusement battus et qui, lorsqu’on leur demandera un nouveau coup de collier, n’hésiteront pas à le donner avec vaillance ». Enfin, pour ramener le calme, il demande à la population nantaise  de s’abstenir « de stationner sur le passage du train de 20 h 25… cela rendra service aux poilus ».

 

Le Phare utilise un ton très différent. Sous le titre : « Une propagande abominable » il développe la théorie du complot, qui exonère les autorités militaires et civiles de leurs responsabilités dans cette crise : « Des témoins nombreux et dignes de foi pourraient affirmer… que des individus suspects jettent par parquets volumineux, sur le quai des gares intermédiaires entre Savenay et Chantenay, des papillons portant cette inscription : « Les femmes veulent la paix et leurs droits ! » Ces papillons empoissonnés sont, par les mêmes personnages, répandus à travers les wagons où chacun peut les ramasser à poignée que veux-tu ».