jeudi, 8 mai 1919

« Le texte du traité »

Le général Buat écrit dans son Journal :

« Un officier est venu, hier soir, apporter au maréchal Pétain la brochure – énorme – qui représente le traité de Paix. Tout le monde s’est précipité sur le document et en a perdu le boire et le manger. Au fond, ce traité est une strangulation complète de l’Allemagne ; reste à savoir si toutes les précautions sont bien prises pour maintenir le nœud de la corde bien serré ».

 

La première page du Populaire (voir ci-dessous) suggère cette impression de « strangulation » dont parle Buat alors que Le Phare garde un ton neutre : « Un chapitre de l’histoire du monde – Le traité de paix est solennellement remis aux plénipotentiaires de l’Allemagne ».

 

Sous les gros titres et sur deux pages les journaux nantais publient ensuite « Le texte du traité » ou plutôt les extraits qu’on a bien voulu leur transmettre. Ce qui provoque la colère de Gaston Veil : « La censure chez nous tiendra jusqu’au bout… et même au-delà. Le peuple allemand connaît ce texte [le traité] qui a paru dans plusieurs journaux de Berlin. Mais nous autres, nous n’avons toujours sous les yeux que le résumé de M. Tardieu… C’est abracadabrant. Il n’y a pas d’exemple d’arbitraire poussé à ce point ».

 

Le silence officiel ouvre la porte à toutes les rumeurs et Gaston Veil poursuit : « Le résumé serait, à ce qu’on raconte tendancieux… Il y aurait dans le texte complet des atténuations qu’on ne trouve pas dans l’autre document… Il y a dans le résumé toutes sortes d’obscurités et d’équivoques… ».

 

Voilà une paix bien mal partie.