mercredi, 20 juin 1917

Le caporal épinglé

 

Les trains de permissionnaires venant de Bretagne ne passent plus à Nantes depuis le 18 juin, mais ceux venant du Croisic et de Saint-Nazaire traversent toujours la ville.

 

Ce jour, l’inspecteur de police Chavannes y mène l’enquête :

«En gare de Chantenay, j’ai monté dans un vagon, composé d’une grande partie de militaires permissionnaires. Ces derniers paraissaient très animés. Dès le départ de Chantenay, un soldat du 247e d’infanterie a crier de toutes ses forces et presque sans arrêt : « Vive la Révolution » – « A bas la guerre » – « Vive les boches » – « A bas la France » – et cela jusqu’à la gare d’Orléans.

Deux zouaves, un du 9e l’autre du 4e, toujours dans le même compartiment, ouvrirent chacun une portière, vers les escaliers Sainte-Anne. A cet endroit de la voie qui est étroite, les portières portèrent sur les barrières qui les démontèrent en partie… ».

 

 

Ce même jour, Le Phare relate le procès, devant le conseil de guerre de la 11e région militaire, du caporal Menay, du 116e d’Infanterie, infirmier dans la vie civile, accusé d’avoir tenu, en gare de Pontchâteau, dans un groupe de civils et de militaires : « des propos antipatriotes extrêmement graves. Menay disait : « C’est honteux que les femmes et les filles travaillent à faire des obus pour tuer leurs fils et leurs frères. Il faut qu’elles se mettent en grève ». Et le caporal tint ainsi un véritable discours anarchiste, disant, entre autres choses : « Si le 116e se révolte, je serai le premier à marcher. Nous avons passé trois hivers dans les tranchées, nous n’en passerons pas quatre » et il concluait au cri de : « Vive la révolution ! A bas la guerre ! »

Dans le train qui l’emmenait de Pontchâteau à Saint-Nazaire, Menay continua à émettre les mêmes théories ».

 

Le caporal fut condamné à cinq ans de prison et à 5 000 francs d’amende.