samedi, 21 juillet 1917

La République au coeur

Dans son éditorial de ce jour, Gaston Veil laisse éclater son courroux :

 

« Il s’en passe de belles dans notre région ! Je reçois depuis deux ou trois semaines des lettres dans lesquelles des citoyens me racontent avec tristesse et colère le spectacle auquel ils assistent… c’est devenu une mode paraît-il dans notre région de consacrer certaines communes au Sacré-Cœur… ».

 

S’appuyant sur les récits rapportés dans la presse catholique Gaston Veil décrit les cérémonies qui se déroulent dans de nombreuses paroisses rurales. A l’occasion de la messe dominicale ou des vêpres, le maire accompagné de son conseil municipal vient s’agenouiller devant l’autel, entre le drapeau du Vatican et celui de la France, pour y consacrer sa commune au Sacré-Cœur en ces termes : « Considérant que Notre Seigneur Jésus-Christ… possède par droit d’héritage et de conquête toutes les nations et qu’il a demandé à tous… de se consacrer à son divin Cœur ; répondant aux vœux des habitants de cette commune qui professent pour le Cœur sacré du Divin Sauveur la plus profonde vénération… nous avons décidé de consacrer la commune de … au Cœur adorable de notre Dieu et Sauveur Jésus-Christ… ».

Il y a là de quoi donner un haut le cœur au républicain G. Veil. Il en appelle au gouvernement :

« Si je ne me trompe, une administration municipale est un pouvoir civil et par conséquent doit demeurer tout à fait en dehors des affaires religieuses… J’estime que le Gouvernement commet une faute grave en ayant l’air d’ignorer ces défis jetés au bon sens et à la République…

Le devoir du Gouvernement est de défendre non seulement le pays contre ses ennemis, mais aussi la République contre ceux qui l’attaquent… ».